Quarto 55 / 2025, unlesbar

Des notes griffonnées sur un bloc, un vieux fichier texte rempli de charabia, un document crypté, des caractères inventés, de la calligraphie : on rencontre de l’illisible aux archives comme dans la vie de tous les jours. Le numéro 55 de la revue «Quarto» présente des cas de ce type à la limite du lisible, tirés des fonds des archives, et révèle les contextes dans lesquels même l’illisible peut véhiculer du sens.

Quarto 55
Couverture : anamorphose d’un manuscrit de Gertrud Leutenegger (photo : Simon Schmid, BN)

Le dernier numéro de «Quarto» aborde un thème pour le moins inhabituel dans une revue littéraire : l’illisibilité. Il présente des textes et des documents issus des Archives littéraires suisses qui, par leur nature, sont des lectures sur lesquelles on bute, difficiles voire impossibles à comprendre, mais qui fascinent justement pour cette raison et incitent à les déchiffrer et à les replacer dans leur contexte. Comme le montrent les articles réunis dans ce numéro, c’est ce qui confère à ces textes une dimension particulière.

Il suffit de feuilleter la publication pour se rendre compte que le phénomène est plus divers et étendu qu’on ne le penserait.

  • Dans sa contribution, Andrea Polaschegg aborde le sujet sous un angle général et esquisse une histoire culturelle de l’illisible, toujours associé au cryptique et à l’énigmatique.
  • Fabien Dubosson examine un exemple de caractères inventés que l’on doit à l’auteur Jean-Marc Lovay.
  • Christian Driesen démêle l’écheveau des griffonnages et conclut que la graphie seule, sans signification, peut s’interpréter à défaut d’être déchiffrée.
  • Irmgard M. Wirtz présente les palimpsestes d’Erica Pedretti, collages textuels qui procèdent d’un jeu esthétique entre lisible et illisible.
  • Magnus Wieland montre comment la technique de la «surfrappe» à la machine à écrire, tout en produisant de l’illisible, permet de nouveaux procédés poétiques.
  • Reto Sorg situe les célèbres microgrammes de Robert Walser, loin d’être des cas isolés, dans l’histoire culturelle des micro-caractères.
  • Philipp Hegel livre un aperçu historique et méthodologique de la sténographie, qu’on ne sait pratiquement plus lire aujourd’hui.
  • Anna Stüssi analyse le Denis Bussard et Fabien Dubosson décortiquent l’emploi d’une écriture codée par William Ritter dans ses Journaux intimes.
  • Stefan Zweifel met au jour le sous-texte sadien présent dans des œuvres littéraires suisses.
  • Lucas Marco Gisi traite du lien entre illisibilité et textes inachevés à la lumière du poème sans fin de Franz Dodel.
  • Daniela Kohler se penche sur la poésie runique d’Otto Nebel, qui tient de l’écriture magique et de la cryptologie.
  • Annette Gilbert, enfin, étudie les procédés artistiques de stéganographie à l’ère du tout-lisible rendu possible par les technologies.

Trois contributions littéraires viennent compléter ce numéro : Birgit Kempker pose la question «Que veut dire lisible ?» dans un essai riche en associations d’idées ; Rudolf Bussmann présente son méli-mélo de bouts de papier et explique pourquoi il tend parfois à écrire en caractères minuscules ; Franz Dodel livre un morceau choisi de son poème en haïkus Nicht bei Trost, potentiellement illisible puisqu’il n’a pas de fin.

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